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L’alimentation ancestrale, pour renouer avec la santé de fer de nos ancêtres (partie 2)

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Dans le premier article de cette série sur l’alimentation de nos ancêtres, nous avions remonté le temps jusqu’à nos plus lointains ancêtres connus, les australopithèques. En s’appuyant sur les études les plus solides à disposition et les indices laissés par l’Histoire, nous avions reconstitué leur alimentation, très diversifiée et omnivore. Aussi, nous avions touché à un concept évolutionniste important appelé « Expensive tissue hypothesis » ou « Théorie des tissus couteux ». En résumé, ce concept oppose le développement du cerveau à la complexité et à la taille de l’appareil digestif [1] [2]. Plus l’intestin est développé, plus le cerveau est réduit, proportionnellement à la taille de l’animal. Et bien sûr, en préambule, nous avions posé les bases de l’alimentation ancestrale : elle n’est pas un modèle unique de diète, mais un cadre dans lequel se retrouvent toutes les diètes qui restent cohérentes avec l’évolution de notre espèce et avec notre génétique.

Dans cette seconde partie, nous allons reprendre notre voyage dans le temps en suivant le cours de l’évolution des hominidés et de leurs habitudes alimentaires. Sur ce chemin, nous allons explorer les temps qui ont vu naître notre genre, homo, qui, bien plus tard, donna naissance à notre espèce, homo sapiens.

Les descendants d’Australopithèque choisissent la spécialisation alimentaire

Environ 2 millions d’années avant notre ère, Australopithèque engendra deux lignées distinctes : Paranthropus et Homo. Les scientifiques ont longtemps pensé que les importantes différences d’évolution et de destin entre Paranthropes et premiers « Hommes » étaient dues à des facteurs géographiques. Pourtant, cette hypothèse a été depuis reléguée. Il semblerait que ce soient bien les changements d’habitudes alimentaires qui soient en cause.

Leur ancêtre, Australopithèque était un omnivore généraliste, à l’alimentation très diversifiée. Pour pouvoir profiter efficacement d’une telle variété alimentaire, il devait maintenir un appareil digestif complexe et couteux en énergie. Le développement réduit de son cerveau était le prix à payer sur l’autel de l’évolution.

Ses descendants, eux, prirent tous deux la voie de la spécialisation, mais dans des directions diamétralement opposées, comme le montrent les études trophiques. Celles-ci se basent par exemple sur l’analyse de l’émail dentaire des fossiles de cette époque.[3]

En comparant leur teneur en strontium, en baryum et en calcium avec ceux d’animaux issus des mêmes ères géographiques et dont nous connaissons le régime alimentaire, les scientifiques peuvent reconstruire une image solide de l’alimentation de nos ancêtres hominidés et de leurs cousins paranthropes.

Balter, V., Braga, J., Télouk, P. et al. Evidence for dietary change but not landscape use in South African early hominins. Nature 489, 558–560 (2012).

Les différences cruciales de régime alimentaire entre Homo et Paranthropus

Ainsi, Paranthrope était un omnivore à forte tendance végétalienne, dont le régime alimentaire était très proche des animaux folivores (se nourrissant principalement de feuilles des arbres). La lignée homo, elle, se spécialisa dans la consommation d’aliments d’origine animale.  Elle le fit à un degré tel que ces études ne parviennent pas à différencier les premiers hommes des animaux strictement carnivores.

Il est probable que nos ancêtres lointains chassaient du petit gibier et se nourrissaient sur les carcasses de gros gibier laissées par les grands prédateurs. Ils tiraient probablement une grand richesse nutritionnelle de la moelle osseuse souvent laissée intacte par ces derniers. Ils y accédaient en brisant les os à l’aide d’outils rudimentaires tels que des pierres.

Ce long passé de charognard et d’hypercarnivore explique probablement l’acidité encore très importante de l’estomac humain moderne. Nous reviendrons sur cet aspect dans un prochain article, mais sachez que l’acidité gastrique de l’être humain est équivalente aux charognards opportunistes et aux carnivores stricts. Produire une telle acidité et protéger l’estomac contre celle-ci est couteux métaboliquement pour notre espèce. Le maintien de cette caractéristique au travers de l’histoire et jusqu’à nous révèle beaucoup de choses sur les habitudes alimentaires dominantes de notre espèce. [4]

Les premiers hommes, des omnivores hypercarnivores

Tout laisse à penser que les premiers hommes consommaient des fruits de façon régulière pour compléter leur diète carnée. Il est probable qu’en période de disette, chasse infructueuse par exemple, ils se rabattaient sur les USO (Organes de stockage souterrain des végétaux) comme les tubercules et les racines ou d’autres végétaux. Néanmoins, les scientifiques estiment que leur recours à ce type d’aliments était nettement moindre que chez l’ancêtre Australopithèque. En tous les cas, il est établi assez clairement que ces végétaux étaient pour eux des aliments « de secours » ou « de survie », et non pas une base alimentaire comme chez le cousin Paranthropus.

alimentation prehistorique
Human-brain-Dr.-Miki-Ben-Dor

Cette alimentation omnivore à tendance fortement carnivore offrit à nos ancêtres des nutriments concentrés, bioactifs, digestes et hautement assimilables. L’avantage conféré par cette spécialisation alimentaire permit d’amorcer une évolution radicale et déterminante pour le genre homo et son avenir : Une réduction de l’appareil digestif au profit d’un accroissement important de la taille du cerveau. Ainsi, homo habilis possédait un volume crânien moyen de 650cm3, ce qui représentait 1,7% de son poids corporel. Homo ergaster / erectus, possédaient un volume crânien allant de 700 à 1100cm3. À titre de comparaison, Australopithèque était à 450cm3 pour 1,3% du poids corporel (moyenne).

Cette évolution donna au genre homo sa meilleure arme : son cerveau. Elle fit de lui un prédateur redoutable, chassant en groupes organisés, capable d’utiliser des armes rudimentaires et d’établir des tactiques simples. Ainsi, il fut en mesure de venir à bout de n’importe quel animal, y compris les plus gros, et de concurrencer les grands prédateurs sur leur terrain de prédilection. Dans le prochain article de la série, nous accompagnerons les hommes sur leur ascension vers le sommet de la chaîne alimentaire. Nous avons laissé sur notre chemin le cousin végétalien Paranthropus, solide et fruste primate spécialisé dans la digestion des fibres coriaces des végétaux, lignée avortée de l’Histoire.

Sources

[1] Aiello, Leslie C. and P. E. Wheeler. “The Expensive-Tissue Hypothesis: The Brain and the Digestive System in Human and Primate Evolution.” Current Anthropology 36 (1995): 199 – 221.

[2] Isler, Karin, and Carel P van Schaik. “Metabolic costs of brain size evolution.” Biology letters vol. 2,4 (2006): 557-60. doi:10.1098/rsbl.2006.0538

[3] Balter, V., Braga, J., Télouk, P. et al. Evidence for dietary change but not landscape use in South African early hominins. Nature 489, 558–560 (2012). https://doi.org/10.1038/nature11349

[4] The evolution of the human trophic level during the Pleistocene, Miki Ben-Dor, Raphael Sirtoli, Ran Barkai, First published: 05 March 2021 https://doi.org/10.1002/ajpa.24247

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